Comment valoriser son offre éco-conçue? Selon Cédric François, le CEO d’Equium « si on ne gère que les opportunités, on est amené à mentir un jour ou l’autre. Si l’éco-conception n’est pas ancrée dans l’ADN de l’entreprise, inutile de communiquer ». Autour de cette table, nous aurons de quoi nous inspirer. Mais commençons par le pourquoi l’éco-conception.
Comment mettre en place une stratégie d’éco-conception ? Comment valoriser une offre éco-conçue? Cédric François, le CEO d’Equium anime le débat avec des représentants de l’ONU, l’ADEME, du Pole Eco-conception, La Florentaise, Maison Verte et Décathlon et part un constat : il faut repartir des bases de la Raison d’être, pourquoi faisons-nous ce business? Voici les 7 étapes de mise en oeuvre.
1- Commencer par le sens : Why, What, How
La France consomme MOINS en volume et MIEUX en valeur, c’est une tendance confirmée depuis plusieurs années et le marketing qui se veut responsable tient compte de cette nouvelle donnée. La stratégie RSE découle d’une vision claire du futur, l’engagement dans la démarche environnementale devient naturelle et influence toute la chaine de valeur. Bref, si vous êtes vrai, tout sera transparent, crédible et donc vendable.
People don’t buy WHAT you do, but HOW you do it, Simon Senek
2 – S’inspirer des meilleures pratiques RSE
Bettina Heller, Associate Programme Officer Resources and Markets Branch du programme de l’environnement de l’ONU de la division économique, rappelle que son organisation représente, un programme international qui « agit par le haut et la dimension sectorielle ».
L’ONU porte le projet One Planet Network, une ONG dont le rôle est la mise en relation d’acteurs d’une même branche. Ceux-ci sont répartis en différents groupes de travail qui oeuvrent sur des thèmes comme l’allongement de la durée de vie des produits, les impacts sociaux, la définition des éco-labels, etc. Ensemble, les groupes élaborent des guides s’inspirant à la fois des grands principes issus de la norme ISO 26000 et des meilleures pratiques métier.
L’idée est de mettre en place une méthode de travail applicable à tous les professionnels d’une même branche. L’ONU défend l’écologie et l’environnement de manière pragmatique à travers sa plateforme disponibles en ligne. Avec le programme proposé par One Planet Network, l’ONU complète ainsi les dispositifs des acteurs de chaque pays, pour créer un référentiel international.
3 – Lisez le guide de l’Auto-déclaration avant le GO !
Puis Florian Ribeiro, chargé de mission au sein du Pôle Eco-conception de Saint Etienne précise qu’un travail de rédaction d’un Guide de l’Auto-déclaration est en cours. Ont été sollicités l’ADEME, l’ONU, l’ARPP, l’AACC, DGCCRF, Aurélie Merle, enseignant-chercheur en marketing, Grenoble Ecole de Management (GEM), et Make My Com représentée par Amandine Rovere Marketeuse formée à la RSE (oui, oui, c’est moi!). Ce guide concentre 10 années d’expérience du Pôle Eco-conception et les retours d’expérience de professionnels. Les entreprises qui éco-conçoivent leurs produits créent intrinsèquement leur auto-déclaration. Par méconnaissance et déficit de conseils, elles s’embourbent dans le Greenwashing.
C’est pourquoi cet ouvrage se positionnera comme un outil de marketing et de communication responsable. Il permet de cadrer l’action des chefs de produits, les services de R&D et de communication. Toutes les déclinaisons de la norme ISO 14020 (14021, 24, 25, 26), la définition d’un éco-profil, la manière d’utiliser le bilan carbone et la démystification de l’analyse du cycle de vie (ACV) sont abordés avec précision et recul. Les auteurs listent les éco-labels et distinguent ceux qui sont pertinents, de ceux plus optionnels.
La responsabilité juridique de l’entreprise est engagée dès le lancement d’un produit sur le marché. L’affichage environnemental annonce des arguments aux conséquences juridiques réelles. Cadrer la communication et son auto-déclaration en amont devient capital quand on voit ce qu’il se passe sur les réseaux sociaux au moindre écart. Toute communication doit être : PERTINENTE / EXACTE / VERIFIABLE / NON TROMPEUSE. Pour aller plus loin, le guide donne des outils :
- Un questionnaire : Il s’agit du recueil des questions les plus fréquemment posées autour de 6 thèmes lié à l’éco-conception. Chaque question trouve sa réponse via une fiche technique correspondant aux mots clé utilisés façon Google.
- Un kit de communication durable véritable ligne de conduite éditoriale. Comment susciter l’intérêt, apporter le niveau de preuves suffisant sans rentrer dans le jargon technique, restituer une note de calcul claire. Des études de cas reprennent les arguments essentiels, ceux à éviter, slogans et images à proscrire et celles à valoriser.
J’ai contribué à la rédaction de ce guide, car il le marketing sans éco-conception deviendra vite obsolète. Pratiquer le marketing responsable c’est travailler en amont du produit mais aussi sur sa fin de vie tout en mesurant bien l’impact de sa communication. Si vous souhaitez être informé la sortie du guide : contact@makemycom.fr
4 – Logiciel d’éco-conception de l’ADEME
Rappelons que le rôle de l’ADEME est de sensibiliser le consommateur, encourager la production durable, soutenir l’éco-conception par la mise à disposition du logiciel Base Impacts. Le logiciel Base impacts sert à connaître l’équivalent carbone des matières premières telles que le plastique, le métal, etc. Il est utile pour travailler sur les bilans carbone et l’analyse du cycle de vie (ACV). Utiliser cet outil permet de connaitre très rapidement l’impact carbone des matières qui composent le produit.
L’ADEME joue le rôle de coordinateur entre les acteurs économiques. Elle accompagne activement le secteur de l’habillement, et co-pilote d’autres secteurs : les Déchets Electriques et électroniques (DEEE) est un sujet porté par la FNAC, la CAMIF s’investit dans l’ameublement, l’alimentaire est traité par le groupe Casino. Les retours d’expériences sont consolidés par l’ADEME qui assure l’orchestration d’une communication transversale et met à jour son logiciel ADEME Base Impacts.
Les entreprises bénéficient ainsi GRATUITEMENT d’un logiciel toujours à jour et d’informations métiers récentes. Aujourd’hui la FNAC affiche l’impact des DEEE en magasin. Déjà près de 70 chaînes d’hôtels présentent leur empreinte environnementale comme preuve de leur connaissance du sujet. L’affichage environnemental permet ainsi aux consommateurs d’acheter en connaissance de cause et aux autres acteurs du marché de suivre l’exemple.
5 – Suivez les directives de l’éco-label européen
Grâce à l’ADEME, l’éco-label européen est devenu la norme. Il représente un véritable repère que l’on retrouve partout dans les magasins. L’éco-label européen le plus connu. C’est l’AFNOR Certification qui en assure la délivrance.
- La concertation des parties prenantes imposée par l’éco-label, en fait un référentiel fiable dans les produits de consommation alimentaires et non-alimentaires.
- L’éco-label européen est reconnu par 76% des consommateurs : la sensibilisation a été un véritable succès. Il en est de même pour « la mention AB » pour l’Agriculture Biologique, lui aussi, bien repéré dans l’alimentaire.
- Ainsi les marques qui obtiennent le label constatent une nette amélioration de leur chiffre d’affaires, les autres semblent stagner, perdent petit à petit des parts de marché.
C’est le cas Nutella, dont le CA ralentit depuis 2019, la concurrence fait rage. La « faute à son huile de palme » sévèrement décriée. Ferrero est attaqué en Europe par de nouvelles marques éthiques, bio, locales.
6 – L’éco-conception est une innovation de rupture
La Florentaise, quand la RSE s’impose par la loi. Leur métier ? L’extraction du sable de la Loire et l’exploitation de la tourbe denrée devenue rare car non renouvelable. Leur contrainte ? La Loi interdit l’extraction de tourbe. Leur enjeu : comment servir les grandes distributeurs et grandes pépiniéristes en engrais ?
L’entreprise se voit contrainte d’évoluer et s’oriente vers la fibre naturelle. « Nous avons étudié les fibres de bois et de coco. La fibre offre des propriétés intéressantes, elle reste un peu moins cher que la tourbe et se marie bien avec les terreaux. Nous avons fait des essais sur toute la France pour vérifier que les matières premières étaient compatibles et les résultats ont été probants ».
Une contrainte légale transformée en succès commercial.
La démarche RSE a été menée durant 5 ans, ce qui a contribué à faire avancer les volets : social, sociétal, économique et environnemental. Nous avons compris que les clients étaient prêts à passer à la RSE mais pas prêts à mettre plus cher. Botanic, a même imposé des caractéristiques contraignantes dans les cahiers des charges avant la sortie de la loi. Les collectivités publiques sont maintenant très en demande.
« Ce changement nous a permis d’accéder à de nouveaux marchés et d’investir de manière efficace en R&D. Récemment nous sommes passés de 4 à 10 usines pour être présents en France et assurer un sourcing local. Notre terreau est maintenant éco-labellisé » affirme un salarié de Botanic.
Résultat : Nous enregistrons 33% croissance du CA : 1,3 million de m3 de substrat a été vendu cette année aux plus grandes enseignes comme Système U, Botanic, Truffaut, Aubadia. Finalement, cette loi nous aura fait gagner sur tous les plans.
7 – Un Eco-produit ouvre de nouveaux marchés
Affichage environnemental : Quand le secteur ménager nettoie devant sa porte
Le groupe SWANIA possède les marques Maison Verte, YOU et O’Cedar. Elles font partie des plus grandes marques de l’univers ménager, très chahuté en matière environnementale et fortement concurrentiel. La marque MAISON VERTE est la plus connue et reste destinée à ceux qui ne veulent pas encore passer au tout green. En effet, d’un point de vue composition, les produits de la marque ne sont pas les plus écologiques du groupe, un paradoxe assumé. Notre étude sur 1000 consommateurs a démontré que :
- 81% des personnes intéressées par l’environnement utilisent l’éco-label comme repère
- 84% estiment que ces produits sont plus efficaces qu’avant (et non l’inverse!)
- Le label le plus reconnu était l’éco-label européen (nous avons tenu compte des critères qu’il imposait). Swania a alors crée la marque YOU, destinée à un public averti, exigeant et qui lit les étiquettes dans le détail. YOU se veut absolue : avons sélectionné des matières à 95% végétales et créé des recharges ultra concentrées pour satisfaire leur demande.
« Le label Eco-cert nous a servi de guide, et nous avons scindé notre calendrier entre le faire et le faire savoir. Nous ne pouvons pas aller dans la sur-enchère en matière de communication. C’est pourquoi nous avons choisi d’afficher toutes les matières premières dans l’étiquette, sans communiquer sur les autres supports. Notre argument de vente ? Proposer des produits aussi neutres que possible pour l’homme et l’environnement ».
8 – La collaboration des parties prenantes
Décathlon, l’affichage environnemental lui va comme un gant. Raffaele Duby, responsable Environnement éco-conception chez Décathlon, précise que l’affichage environnemental sera vu à terme par 250 millions de sportifs. Il était temps de travailler sur le sujet car 73% de l’impact environnemental vient de nos produits. A ce jour, ce ne sont que 1500 produits vendus online qui sont étiquettés. Pour en arriver là, 10 années ont été nécessaires. Les cinq lettres A, B, C, D, ou E sont affichées sur le 1/3 de l’offre textile, chaussures et confection.
A mi-2019, nous devrions pouvoir afficher la note sur 50 % des produits proposés en magasin. L’affichage environnemental permettra au client de faire son choix en connaissance de cause.
Il s’agit d’un changement énorme, qui a nécessité de :
- connaître les matières et les procédés utilisés.
- modéliser les impacts de production sur l’environnement,
- créer un référentiel type pour chaque produit (t-shirt, ou pantalon) et travailler avec nos fournisseurs.
- partager nos méthodes, créer des critères communs avec une base de données harmonisée pour effectuer les calculs
- benchmarker d’autres acteurs du secteur
Coté clients, nous avons identifié qu’il fallait 7 éléments maximum sur une affiche en magasin, sinon le consommateur ne percute pas! Côté collaborateurs, nous nous sommes formés au Lean Management et travaillons avec une philosophie « orientée client ». Donc si l’utilisateur ne veut pas d’un produit, on le change.L’affichage environnemental fournit aux chefs de produits a fait évoluer les mentalités : ils ont écarté d’eux-mêmes les produits mal notés. Avoir une charte graphique claire a également aidé à l’appropriation du sujet.
Résultat : Décathlon fait partie des entreprises les plus en avance sur ce sujet en France.